Quelle acceptabilité sociétale des projets de méthanisation?

Suite aux nombreuses contestations envers le méthaniseur industriel BioQuercy à Gramat (Lot), un rapport du ministère de la Transition écologique a proposé une série de recommandations pour améliorer l’acceptabilité notamment par une approche participative d’anticipation des nuisances potentielles et par la définition et la mise en oeuvre d’actions destinées à les prévenir.

L’acceptabilité de la méthanisation: les grandes problématiques

Si la question de l’acceptabilité des projets de méthanisation se focalise assez vite sur les relations avec les riverains, il convient de souligner que ce ne sont pas les seules parties prenantes impliquées.

Une étude d’un projet abandonné suite aux oppositions a été réalisée en collaboration avec le laboratoire de sociologie CERTOP de Toulouse et la société Acceptables Avenirs et le soutien de l’ADEME. Cette étude montre que les mouvements d’opposition naissent certes des riverains. Mais ces derniers sont généralement rejoints par d’autres parties prenantes telles que les associations de protection de l’environnement, même si on constate qu’elles n’ont pas d’opposition de principe à la méthanisation.

Aux questionnements des riverains et des associations, il faut ajouter ceux de la profession agricole qui portent généralement sur les modalités techniques et économiques de projets importants.

Le fait que les questionnements soient partagés par plusieurs parties prenantes montre que l’acceptabilité de la méthanisation ne se réduit pas au phénomène Nimby (pas dans mon jardin). L’étude CERTOP-Acceptables Avenirs montre que l’acceptabilité du projet est liée à trois principaux facteurs :

  • Sa taille qui influence les impacts (circulation de camions, quantité et origine des intrants, degré de nuisances olfactives, etc.) ;
  • Son portage (agriculteurs seuls ou en regroupement, industriels, collectivités ou investisseurs) qui peut conditionner la capacité du projet à s’inscrire dans une économie locale et circulaire ;
  • Les modalités de son développement qui doivent répondre à l’exigence croissante de la société d’une implication citoyenne amont et d’une forte crédibilité technico-économique.

Agir en deux temps pour faciliter l’acceptabilité

Un porteur de projet aura alors tout intérêt à agir en 2 temps afin de faciliter l’acceptabilité de son projet.

Le premier temps sera consacré à la vérification de différents points le plus en amont possible et, de préférence, dès les études de pré-faisabilité. Il faudra en particulier évaluer l’adéquation entre la taille du projet, son portage et ses modalités de développement, et le niveau d’implication des parties prenantes. Ce premier temps permettra entre autres de prévoir des variantes au projet pour répondre aux conditions de mise en adéquation avec le territoire.

Le second temps sera consacré au dialogue avec les parties prenantes pour répondre aux questionnements et, si nécessaire, échanger sur les variantes avec l’objectif de répondre aux attentes tout en respectant les contraintes techniques, économiques et réglementaires.

Il est important de souligner que les modalités du dialogue (information, consultation, concertation, co-construction) ainsi que les nombreux outils pour les mettre en œuvre (ateliers, rencontres en face à face, réunions publiques, porte à porte, enquêtes, sites internet, applications) doivent être mûrement réfléchis pour s’adapter aux caractéristiques du projet, du territoire et des parties prenantes.

Le coût de l’acceptabilité: plus difficile à porter pour les projets de méthanisation?

Vous l’aurez compris, l’acceptabilité ne se décrète pas, elle est fortement liée à une démarche où les dimensions sociétales d’un projet doivent être prises en compte avec le même poids que les éléments techniques, économiques et réglementaires.

Cependant, l’intégration de la dimension sociétale a un coût. Et ce coût n’est pas toujours facile à absorber dans des projets de méthanisation à l’équilibre économique tendu.

Pour aider les porteurs de projets, il convient donc de leur proposer des prestations et outils accessibles et à des coûts raisonnables, que ce soit pour obtenir de l’information qualifiée ou les accompagner dans leur dialogue avec les parties prenantes.

L’enjeu est bien-entendu l’innovation. C’est en innovant dans les solutions de diagnostic, d’accompagnement et de dialogue qu’il sera possible de faciliter la mise en adéquation d’un projet avec son territoire à un coût maîtrisé.

Philippe Vervier

Remerciements

Je remercie celles et ceux avec qui j’ai échangé au sujet de cette réflexion sur l’acceptabilité sociétale du biogaz (Tristan Rigou, Aris Siewe, Laurent Ducommun, Luc Manton, Thibault Caille L’Etienne, Paul Laurent, David Trocherie, Ronan Treguer, Philippe Barthas, Elie Bart, Patrick Mattonai, Alice l’Hostis)

Pour aller plus loin : Masterclass en ligne sur « Comment favoriser l’acceptabilité sociétale des énergies renouvelables » (gratuite)